L’Insondable Bonté de Dieu : Allez à ma Vigne!
25ÈME DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE, ANNEE A.
TEXTES: Is 55, 6-9; Ps 144 (145), 2-3.8-9, 17-18; Ph 1, 20c-24.27a ; Mt 20, 1-16.
En ce 25ème dimanche, nos sociétés se laissent mirer par les textes liturgiques, en particulier la parabole des « ouvriers de la dernière heure » en voyant tant de personnes qui sont au chômage après avoir dépensé tant d’année à l’école ou d’argent pour leur formation. Ils nous chantent leur mélodie : « Mes pensées ne sont pas vos pensées » ; « Chaque jour je te bénirai, je louerai ton nom toujours et à jamais » ; « Pour moi, vivre c’est le Christ », « Mon ami…Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? ».
Avant tout commentaire sur cet évangile, prenons à cœur cette réponse : « Parce que personne ne nous a embauchés ». Alors il leur dit : « Allez à ma vigne, vous aussi ». Ces ouvriers de dernière heure ont cherché à travailler mais personne ne les a embauchés. Rester sans rien faire et attendre la même récompense est incompatible avec la parabole.
Aux villages de Galilée, Jésus voyait sur les places ceux qui n’avaient pas de terres à eux, attendant d’être embauchés pour gagner leur pain quotidien. Certainement qu’il ne cessait de se demander : Comment aider ces pauvres gens à sentir la bonté mystérieuse de Dieu envers tous ? Alors, Jésus leur raconte une parabole étonnante. Il leur parle d’un maître, un propriétaire qui a engagé tous les ouvriers qu’il pouvait. Il est allé lui-même sur la place du village à des heures différentes. Soulignons aussi qu’en ce temps-là, la place du village servait de lieu habituel pour trouver un employeur, comme la place est aussi un lieu de jugement dans la tradition biblique (Cf, Ruth 4). À la fin de la journée, bien que le travail ait été absolument inégal, tout le monde a reçu le même salaire : ce dont chaque famille avait besoin pour vivre. Mais quel fut l’étonnement ! Les premiers groupes protestent. Ils ne se plaignent pas de recevoir plus ou moins d’argent. Ce qui les offense, c’est que le Seigneur « a traité les derniers comme eux ». La réponse du Maître à celui qui joue le porte-parole est admirable : « Mon ami, je ne suis pas injuste envers toi…Ton regard est-il mauvais parce que moi, je suis bon ? ». L’homme est qualifié d’ami (ἑταῖρε, os), de compagnon. C’est là la véritable « récompense », devenir non un simple ouvrier de la Justice, mais un ami du Juge, un vrai fils/fille de Notre Père. Que nous enseigne-t-elle cette parabole de Jésus ?
En effet, l’image du vignoble qu’utilise Jésus n’est pas le fruit du hasard. La vigne est la première plante cultivée par Noé après le déluge, la plus présente dans la Bible et représente bon nombre de fois la relation et l’Alliance entre Dieu (le vigneron), Israël (sa vigne) et son peuple (ses ouvriers). Elle évoque l’Alliance et surtout d’un temps nouveau attendu où le vigneron divin viendra rebâtir sa vigne, l’avènement du Royaume des Cieux. La parabole et la logique du personnage peuvent nous faire réagir. Elle nous fait penser au temps de la rétribution qui nous renvoie à celle attendu au jour du jugement. Elle répond aussi à la question de Pierre pour avoir tout quitté et suivi Jésus dès la première heure… Voici que nous avons tout quitté pour te suivre : quelle sera donc notre part ? Pierre tout comme les autres, même les moins méritants, recevra la même part ! Le trône promis n’est pas une récompense, mais un service. N’est-elle pas si révolutionnaire que nous n’osons pas encore la prendre au sérieux ?
Tous nos schémas chancèlent quand l’amour libre et insondable de Dieu s’érupte dans le monde et en chacun de nous. C’est pourquoi nous trouvons scandaleux et incompréhensible que Jésus semble oublier les « pieux », chargés de mérites, et qu’il se rapproche précisément de ceux qui n’ont pas droit à une récompense de la part de Dieu : les pécheurs qui n’observent pas l’Alliance et la volonté de Dieu ou les prostituées qui n’ont pas accès au temple et à la communion eucharistique…
Dès fois, nous nous enfermons dans nos calculs, nos intérêts sans laisser Dieu être Bon, Généreux, pour manifester sa bonté envers tout le monde. Nous n’acceptons pas sa bonté infinie envers tout le monde car nous sommes convaincus qu’il y a des gens qui ne le méritent pas et c’est seulement nous. Heureusement que Dieu n’est pas comme nous. De son cœur de Père, il sait aussi donner son amour sauveur à ces gens que nous ne savons pas aimer : « La bonté du Seigneur est pour tous, sa tendresse, pour toutes ses œuvres, tous acclameront sa justice » (Cf. Ps 144, 9.7b).
Que devant la Lumière du Verbe et l’Esprit de Grâce se dissipent les ténèbres du péché et la Nuit de l’incroyance. Et que l’Amour de Jésus habite dans nos cœurs. Amen.
P. Roméo Yémso, Svd.