ANNONCER LE CHRIST JESUS

CINQUIÈME DIMANCHE DE CAREME, ANNEE A

Ez 37, 12-14 ; Ps 129 (130), 1-2, 3-4, 5-6ab, 7bc-8; Rm 8, 8-11; Jn 11, 3-7.17.20-27.33b-45)

Image: Wikimedia Commons

Bien aimés dans le Christ Jésus, « L’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus habite en vous ». Aujourd’hui la parole de Dieu pour ce Cinquième dimanche est devant le paradoxe de la vie humaine : la mort ! C’est quoi la vie ? Qu’est-ce que la mort ? Comment faut-il vivre ? Comment faut-il mourir ?  Que signifie la tombe ? Que signifie la pierre tombale ? A chaque instant l’homme se sent impuissant, il se voit devant un avenir incertain, ténébreux, chaotique et fini. Comment vivre avec un proche, un ami, un frère ou une sœur aujourd’hui et demain (si tu as de la chance) on informe que la personne n’est plus, qu’elle est morte ou disparue ? Ou seulement une dalle ou une motte de terre vient de vous séparer ? Voilà, vivons-nous dans l’angoisse car nous ne savons pas ce va se passer aux heures suivantes. C’est pourquoi pour amorcer le tournant définit vers la montée pascale, les textes liturgiques nous racontent l’histoire de la Vie éternelle en termes de faire de revivre « les ossements desséchés », de « la résurrection de notre frère Lazare », « Celui que Dieu a secouru » dans un sens symbolique et métaphorique.

Bien aimés dans le Christ Jésus, déjà dans la première lecture la prophétie d’Ezéquiel nous parle de nos os desséchés pour présenter les Israélites exilés et dispersés. Les rêves du peuple d’Israël se sont écroulés et maintenant c’est Dieu qui peut le reconstruire, il envoie son esprit qui fait revivre les morts : « Je vous donnerai mon Esprit, afin que vous viviez ». 

Dans l’évangile de Saint Jean, le récit de la résurrection de Lazare est ahurissant. D’une part, on ne nous présente jamais Jésus aussi humain, fragile et attachant qu’en ce moment où l’un de ses meilleurs amis meurt. D’autre part, jamais nous n’avons été aussi directement invités à croire en sa puissance sauveur : « Je suis la résurrection (ἡ ἀνάστασις) et la vie ». 

Jésus ne cache pas son affection pour ces Lazare, Marthe et Marie de Béthanie qui l’accueillent certainement chez eux chaque fois qu’il montait à Jérusalem. Un jour, Lazare tombe malade et ses sœurs envoient un message à Jésus : notre frère « que tu aimes tant » est malade. Quand Jésus arrive au village, Lazare est enterré depuis quelques jours. Personne ne pourra plus le ramener à la vie. Cette famille est brisée. Quand Jésus se présente, Marie se met à pleurer. Personne ne peut la consoler. En voyant les sanglots de Marie, Jésus ne peut pas se retenir et lui aussi se met à pleurer. Son âme se brise en ressentant l’impuissance de tous face à la mort. Qui peut nous consoler devant la mort ?

Bien aimés dans le Christ, revoyons un peu les paroles de Jésus quand il fut informé de la maladie de son ami Lazare : « Cette maladie ne finira pas dans la mort mais pour révéler la gloire de Dieu » et renchérit en disant : « Lazare est endormi : je vais le réveiller (ἐξυπνίσω)». Ceci nous indique le vrai sens de toute l’histoire. 

Si on se demande si Lazare est ressuscité physiquement, c’est qu’on est toujours morts. Que Lazare ressuscite pour mourir de nouveau quelques années plus tard, ça n’a aucun sens. Ce serait mondain si c’était le but de Jésus. Jésus ne vient pas prolonger la vie physique, il vient communiquer la vie de Dieu. Cette vie annule les effets catastrophiques de la mort biologique. Face au fait de la mort naturelle, la vie qui suit apparaît comme un renouvellement de la vie qui prend fin. 

« Je suis la résurrection » indique que c’est quelque chose de présent, pas d’avenir. Il ne faut pas attendre la mort pour avoir la vie. Et pour que cette vie puisse atteindre l’homme, il faut adhérer à Jésus. Il répond à cette adhésion par le don de l’Esprit-Vie, qui nous place au-delà de la mort physique. 

Bien aimés dans le Christ, à travers la résurrection de notre frère Lazare, Jésus corrige la conception traditionnelle de « résurrection du dernier jour », que Marta partageait avec les pharisiens. Pour Saint Jean, le dernier jour est le jour de la mort de Jésus, où, par le don de l’Esprit, la création de l’homme est achevée. C’est la foi que Jésus attend de Marthe. Il ne s’agit pas de croire que Jésus peut ressusciter des morts, mais il s’agit d’accepter la vie dernière que Jésus possède. 

Où l’avez-vous mis ? Cette question, posée avant d’arriver au sépulcre, semble insinuer l’espoir de retrouver Lazare vivant. Cela indique que ce sont eux qui ont placé Lazare dans la tombe, lieu de mort sans espoir. La tombe n’est pas le lieu propre de ceux/celles qui ont adhéré à Jésus. En leur disant : « Enlevez la dalle ». N’est-ce pas que Jésus demande à la communauté de se dépouiller de sa croyance ? Les morts ne doivent pas être séparés des vivants. Les morts peuvent être vivants et les vivants le vis-versa. 

En retirant la dalle, la frontière entre morts et vivants disparaît symboliquement. La dalle ne laissait ni entrer ni sortir. C’était le signe du point et de la fin de l’existence. La lourde pierre tombale cachait la présence de la vie au-delà de la mort. Jésus sait que Lazare avait accepté la vie avant de mourir, c’est pourquoi maintenant il continue à vivre. En fait, c’est seulement maintenant qu’il possède pleinement la vraie vie. « Celui qui croit en moi, même s’il est mort, vivra ». Avec son cri, Jésus montre Lazare vivant. La vie est compatible avec la mort. Seul en lui nous cherchons la lumière et la force pour lutter pour la vie et affronter la mort. Seul en lui nous trouvons une espérance de vie au-delà de la vie.

Que devant la Lumière du Verbe et l’Esprit de Grâce se dissipent les ténèbres du péché et la Nuit de l’incroyance. Et que l’Amour de Jésus habite dans nos cœurs. Amen.

P. Roméo Yémso, SVD

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